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Suneung : le jour où la Corée retient son souffle

crédit photo : The Korea Herald
crédit photo : The Korea Herald

Ce jeudi 13 novembre 2025, plus de 550 000 lycéens et anciens élèves se sont assis derrière un pupitre, stylo en main, pour passer le Suneung (수능), l’examen d’entrée à l’université. Pendant une journée entière, le pays a littéralement ralenti son rythme pour eux : vols suspendus, circulation modifiée, horaires de travail décalés… et des milliers de parents en prière aux portes des écoles.

Qu’est-ce que le Suneung ?


Le Suneung, abréviation de “College Scholastic Ability Test” (CSAT), est le grand examen standardisé coréen. Il a lieu une fois par an, en novembre, et constitue le critère central pour l’accès aux universités, en particulier les plus prestigieuses de Séoul.


La journée est minutée :

Entrée en salle avant 8h10

Début des épreuves à 8h40 avec le coréen

Mathématiques en fin de matinée

Anglais après le déjeuner (dont une partie de compréhension orale)


Puis, selon les choix des candidats : études sociales ou sciences, seconde langue ou chinois classique


Fin officielle autour de 17h45, après près de 9 heures d’examen.


Tous les lycéens ne le passent pas le même jour dans leur vie, mais pour ceux qui s’y présentent, c’est l’aboutissement de plus de dix ans de scolarité orientée vers cette date.


En 2025, 554 174 personnes s’y sont inscrites, le plus haut niveau depuis sept ans. Près de 70 % sont des lycéens de terminale, les autres sont des diplômés qui retentent leur chance.


Un pays qui s’organise autour d’un examen


Ce qui frappe, vu de France, ce n’est pas seulement la difficulté de l’épreuve, mais la manière dont tout le pays se met en mode Suneung.


crédit photo : The Korea times : Un policier accompagne un élève pour qu'il ne soit pas en retard !
crédit photo : The Korea times : Un policier accompagne un élève pour qu'il ne soit pas en retard !

Le jour J :


  • Horaires décalés : les administrations, de nombreuses entreprises et même la Bourse de Séoul ouvrent plus tard, afin de fluidifier le trafic du matin et de laisser la priorité aux candidats sur la route et dans le métro.


  • Police mobilisée : des véhicules et motos de police sont prêts à escorter les élèves en retard jusqu’à leur centre d’examen. Certains policiers vont même chercher les repas oubliés à la maison pour les leur apporter à midi.


  • Silence dans le ciel : pendant l’épreuve de compréhension orale d’anglais, les décollages et atterrissages sont suspendus sur tout le territoire pendant environ une demi-heure. Les avions déjà en vol doivent rester à haute altitude pour limiter le bruit.


  • Circulation apaisée : autour des centres d’examen, les klaxons sont officiellement proscrits, certains chantiers sont arrêtés, la vitesse est réduite et l’offre de métro est renforcée.


Ce jour-là, on a vraiment l’impression que tout le pays se met d’accord pour dire : “Aujourd’hui, c’est pour eux.”


La solidarité nationale, au-delà des chiffres


Derrière les mesures spectaculaires, il y a surtout mille scènes du quotidien qui disent la solidarité coréenne :


Devant les lycées, des élèves plus jeunes forment des haies d’honneur, agitent des pancartes, distribuent des snacks porte-bonheur et des boissons chaudes à leurs aînés.


Des parents, parfois les grands-parents, attendent des heures devant les grilles, dans le froid de novembre, avec des mains jointes, des yeux rougis, des thermos de soupe ou de thé dans les sacs.


Dans les temples bouddhistes et les églises, des cérémonies spéciales sont organisées pour les candidats. Des murs entiers sont recouverts de petits cartons de vœux accrochés par des familles.


Les voisins évitent de faire du bruit, les commerçants baissent un peu la musique, les Coréens parlent plus doucement près des écoles.


Dans une société souvent décrite comme très compétitive, le Suneung révèle aussi une dimension communautaire très forte : chacun sait qu’il a, un jour, été à la place de ces jeunes, ou qu’un enfant de la famille y sera bientôt.


Une réussite… mais aussi une pression immense


Ce dispositif impressionnant interroge aussi sur l’énorme pression qui pèse sur les épaules des lycéens coréens.


Le résultat du Suneung influence non seulement l’accès à l’université, mais aussi les perspectives professionnelles, le réseau social, parfois même l’image qu’on a de soi.


Beaucoup d’élèves se préparent pendant des années dans des hagwon (instituts privés de soutien scolaire), avec des journées qui peuvent s’étirer jusque tard le soir.


Un nombre important de candidats reviennent après le lycée pour retenter l’examen, parfois plusieurs années de suite, en mettant leur vie entre parenthèses.


Les autorités ont tenté ces dernières années de limiter les “killer questions”, ces questions extrêmement difficiles qui nourrissaient encore plus le recours au privé, mais le débat reste vif sur le modèle éducatif, la santé mentale des élèves et l’équilibre entre réussite scolaire et bien-être.


Ce que le Suneung raconte de la Corée


Vu de l’extérieur, le Suneung peut sembler presque irréel : un pays qui suspend des vols et décale son marché boursier pour un examen. Mais pour la Corée, c’est un condensé de valeurs et de contradictions :


  • la foi dans l’éducation comme ascenseur social ;

  • la rigueur et la planification extrême ;

  • la solidarité collective, qui entoure les jeunes d’encouragements, de prières et de petits gestes de soutien ;

  • et, en même temps, une pression qui interroge sur le coût humain de cette quête de réussite.


Crédit photo : The Korea Times
Crédit photo : The Korea Times

Le 13 novembre 2025, pendant que plus de 550 000 jeunes réfléchissaient à un texte de coréen, à une équation de maths ou à un QCM d’anglais, la Corée tout entière a retenu son souffle pour eux.


Pour nous, en France, comprendre le Suneung, c’est aussi mieux comprendre à quel point la société coréenne est prête à se mobiliser pour ses enfants, jusqu’à transformer une journée d’examen en véritable rituel national. Ce qui me bouleverse dans le Suneung, ce n’est pas seulement la difficulté de l’examen, c’est la manière dont un pays entier se met en retrait pour laisser une génération avancer.

Il y a là une forme de respect collectif : on reconnaît l’effort des jeunes au point de modifier les horaires, le trafic, même les avions.


On dit à ces élèves : “Tu n’es pas seul face à ta feuille. Nous sommes là, autour, à tenir le silence pendant que tu joues une partie importante de ta vie.”


Je crois que beaucoup de jeunes Coréens se construisent aussi avec cette idée-là : ils grandissent dans une société qui, malgré sa dureté, leur montre qu’ils ont une place, qu’ils comptent suffisamment pour que la nation, ce jour-là, s’organise autour d’eux. L’individu ne se construit pas contre la société, mais avec elle.

Le Suneung, par exemple, ce n’est pas juste “leur examen”, c’est “notre journée” en tant que pays.

Le message implicite, c’est : “Tu fais ta part, travailler, étudier, tenir jusqu’ici, et nous, en retour, on fait notre part, te laisser la route, baisser le bruit, ralentir le pays pour que tu puisses te concentrer.” En Corée, l’individu ne se construit pas contre la société, mais avec elle.


Le Suneung, par exemple, ce n’est pas seulement « leur examen », c’est « notre journée » à l’échelle du pays.


Le message implicite, c’est : « Tu fais ta part, tu travailles, tu étudies, tu tiens jusqu’ici, et nous, en retour, nous faisons la nôtre : nous te laissons la route, nous faisons moins de bruit, nous ralentissons le pays pour que tu puisses te concentrer.


Ce jour-là, les élèves ne sont plus seulement des lycéens stressés face à une copie : ils deviennent une génération que tout un pays entoure, protège et accompagne. On leur dit en actes : « Ton avenir compte au point que nous sommes prêts à nous adapter à toi. » Et je crois que beaucoup de jeunes Coréens se construisent aussi avec cette idée-là : ils grandissent dans une société dure et exigeante, mais qui, au moins ce jour-là, leur montre clairement qu’ils ont une place et qu’ils comptent pour plus grand qu’eux.


1 commentaire

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Chikh
il y a 6 jours
Noté 5 étoiles sur 5.

Un paye en ébullition.......pour les futures diplômés....que la réussite soit le résultat de tant d'espérance et de travaille.

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